hypnose Yoga et kinésithérapie: interview de anne girard
Bienvenue pour ce nouvel épisode sur KinéOweb. Aujourd’hui nous allons parler de l’utilisation de pratiques complémentaires à la kinésithérapie et en particulier on va parler de yoga et d’hypnose. (Nous avions déjà abordé ce sujet avec Muriel sur la partie yoga). C’est un immense plaisir d’accueillir Anne qui est kinésithérapeute et qui a intégré également le yoga et l’hypnose dans sa pratique. Elle va nous partager son expérience.
Peux-tu te présenter et nous dire ce qui t’a amené à intégrer le yoga, l’hypnose et la kinésithérapie ?
Bonjour Julien, merci beaucoup pour cette interview, ça me fait hyper plaisir de parler de tout ça. Je suis kiné depuis 2006 donc ça fait déjà un petit moment et puis je suis professeur de yoga depuis 2020. En kiné j’ai une pratique qui est plutôt orientée musculo-squelettique, une
spécificité en rééducation pelvi périnéale et une gestion de la douleur.Donc j’ai fait différentes formations autour de ça en thérapie manuelle en MDT Mackenzie des formations en pelvi périnéale, avec la clinique du coureur avec beaucoup de choses voilà beaucoup de
formations. Et ce qui nous intéresse particulièrement aujourd’hui c’est donc hypnose appliquée à la kinésithérapie, que j’ai fait en 2018 2019 avec GEM-K et Théo Chaumeil, très bonne formation j’ai adoré. Et puis aussi une formation autour de la gestion de la douleur et la communication avec Mike Stewart et l’Agence EBP.
Sur la partie yoga j’ai fait une première formation yoga pour les professionnels de santé et puis ensuite j’ai augmenté le cursus avec le yoga prénatal, le yoga adapté à l’endométriose et une formation de 200 heures pour pour avoir la certification yoga international, Yoga Alliance, pour avoir un diplôme validé, c’est reconnu en fait bien que voilà après on met ce qu’on veut derrière le nom mais en tout cas ça donne une certification. Et depuis l’année dernière, je suis aussi formatrice dans un organisme de formation pour un cursus de 200 heures où je fais une partie yoga et anatomie notamment. On est quatre professionnels de santé dans ce cursus à Marseille à Pura Vida Studio. Donc voilà tout ce que je fais, donc le kiné le yoga une partie de formation qui commence, qui va peut-être se déployer et voilà.
Comment j’en suis venu à tout ça, les événements de la vie j’ai envie de dire. Déjà le yoga j’en fais depuis une dizaine d’années et puis les événements de la vie m’ont amené à me remettre sur le tapis un peu plus assidûment on va dire, et m’ont beaucoup aidé à me transformer sur certains points. Donc ça me semblait nécessaire, c’est quelque chose qui m’a tellement parlé, de l’intégrer à ma pratique. C’est une idée de se remettre en mouvement, donc je le vois au quotidien avec mes patients qui ont besoin de se remettre en mouvement. Et pour l’hypnose, c’est vraiment l’idée d’aller chercher des ressources qu’on
qu’on ne conçoit pas, qui sont vraiment insoupçonnés. Cette idée m’a intéressé depuis toujours et quand j’ai vu qu’il y avait cette formation d’hypnose appliquée à la kinésithérapie je me suis dit mais là c’est super il faut que j’aille voir ça il faut que j’aille tester. C’était vraiment très bien c’était vraiment très chouette ça apporte d’autres clés notamment quand on sort de nos cursus de kinésithérapie. Enfin moi en tout cas quand j’en suis sorti, je me trouvais un peu démunie par rapport à la gestion de la douleur, par rapport à tout ce qu’on pouvait apporter à nos patients et ça pouvait pas être juste des antalgiques qui pouvait régler le problème. Je pense qu’il y avait une vraie prise de conscience à avoir et d’autres éléments à apporter en tout cas pour faire plus de liens, plus de sens. Donc voilà quand j’ai vu cette formation d’hypnose appliquée à la kiné je me suis dit bah voilà c’est vraiment ça et donc voilà comment je suis venu à tout ça.
Par la suite j’ai fait cette formation de communication et de gestion de la douleur aussi qui était très intéressante qui recoupe avec ce qu’on voit aussi en entretien motivationnel avec toutes ces choses là. Mais c’est toute cette idée de communication et de pas être seulement mécanique, l’un va avec l’autre évidemment, mais pour moi c’est pas
l’un sans l’autre les deux ont à gagner à être ensemble. Voilà comment je suis venue à tout ça, et là je rassemble je mets tout ensemble. Donc là je vois toujours les patients en kiné, je donne 4 heures de cours de yoga par semaine et je fais du yoga adapté à la pathologie pour certains qui viennent avec des problématiques donc notamment s’il y a l’endométriose mais
notamment suite de lombalgie ou qui veulent retrouver du mouvement mais en conscience j’ai envie de dire et des formations où j’interviens
Julien: super c’est vrai que tu as un parcours vraiment de kiné qui se forme qui applique parfaitement les recommandations pour les kinésithérapeutes de se former mais en plus tu as réussi à l’intégrer dans ta pratique et également à d’autres activités qui viennent en complément pour autant pour toi d’ailleurs en tant que professionnel de santé que pour que pour les patients.
Concrètement quels sont les champs d’application justement de l’hypnose dans la kinésithérapie ?
En premier lieu je l’utilise dans la gestion des douleurs, plutôt douleurs persistantes, douleurs chroniques, où j’ai quand même beaucoup de patients avec cette problématique. Donc gestion de la douleur, la peur, le stress, l’anxiété. Enfin la peur évitement du mouvement ou suite, par exemple, à un traumatisme ou un accident, un choc, on a peur de se remettre en mouvement. Par exemple, aller faire une rando où il y a un peu de dénivelé, on a eu mal au genou, on n’ose plus y aller. Finalement mécaniquement ça marche très bien mais voilà il y a un frein qui n’est plus d’ordre mécanique mais qui est ailleurs et qui là on peut aller lever. Donc voilà c’est plutôt c’est ça dans les grandes lignes en kiné c’est gestion de la douleur douleur: plutôt des douleurs chroniques, des douleurs aussi neurologiques, douleur persistante, la peur évitement du mouvement et le stress, anxiété.
Voilà après l’hypnose c’est un outil qui est transversal donc moi quand les gens viennent je leur explique je fais l’hypnose appliquer à la kiné. Je ne vais pas leur proposer d’arrêter de fumer ou de maigrir, on reste dans notre champ de compétence de kiné c’est important de le renseigner parce que l’hypnose c’est très large, on peut faire plein de choses mais ça pourrait être une possibilité effectivement.
Qu’est-ce que la pratique de l’hypnose et du yoga t’apporte à toi en tant que professionnel de santé et apporte également aux patients ?
Alors pour moi je trouve que c’est une approche plus complète définitivement. On va pouvoir avoir une plus grande communication avec le patient, on va pouvoir travailler sur l’intensité de la douleur, on va pouvoir la moduler. On va pouvoir travailler sur les facteurs psychosociaux, l’hypervigilance, l’évitement par la peur par l’anxiété donc tout ça c’est très important. Ca sous-entend qu’on passe du temps avec son patient, ça sous-entend qu’on fait un bilan complet avec son patient et qu’on prend le soin de l’écouter. On va forcément prendre le temps d’écouter comment il décrit sa douleur, est-ce qu’il va utiliser “j’ai comme un coup de poignard” dans le dos “ça me fait des fourmis” toutes ces choses là parce que ça c’est des petites choses qui vont résonner et qu’on va réintroduire ensuite où on va rebondir dessus en tout cas. Donc il faut prendre le temps de poser les bonnes questions aux patients d’où l’importance de la communication pour nous de savoir poser les bonnes questions mais ensuite de pouvoir orienter ou réorienter le dialogue avec le patient, c’est vraiment un dialogue. Ensuite on va pouvoir déterminer ce qu’on va utiliser comme outil en hypnose parce que finalement il y a plein de choses.
Comment je l’intègre donc déjà un bilan complet où je n’exclus pas évidemment toute la partie bilan kiné, les tests cliniques qui font partie de ma prise en charge de kiné de toute façon. Mais il y a une petite porte qui s’ouvre suivant ce que le patient me dit où je me dis “ah là ça pourrait être intéressant d’intégrer l’hypnose” toc petite lumière et enfin à la fin de
ça j’en parle aux patient “est-ce que vous êtes vous seriez d’accord pour utiliser cet outil”. On explique ce que c’est que l’hypnose et puis si c’est ok on l’utilise à la séance d’après. Donc je commence par expliquer ce que c’est que l’hypnose, que déjà ce n’est pas une
baguette magique, ça je ne fais pas léviter les gens, je ne les endors pas, donc qu’ils restent pleinement conscient. C’est juste un état de conscience modifiée, c’est à dire on déplace son focus attentionnel sur un point précis, c’est comme si on regardait un tableau de très près, qu’on ne voyait qu’un point. Et là on leur propose de regarder d’un peu plus
loin et d’aller voir tout ce qui se passe autour ou alors de porter son attention sur un autre point du tableau.
Concrètement dans la vie de tous les jours c’est comme quand tu prends ta voiture, que tu fais un chemin que tu connais par cœur, que tu regardes plus la route et que tu es dans tes pensées, tu es arrivé chez toi tu ne sais même pas comment. C’est un déplacement du focus attentionnel, tu vois on le fait tous les jours en fait on s’en rend pas compte. Donc là c’est ce que je leur propose, de déplacer leur attention sur autre chose. Et je réexplique aussi que c’est un exercice. Donc il y a souvent la question qui vient de “oui mais moi je suis pas hypnotisable” ou “j’y arrive pas”. Donc là je leur dit mais en fait tout le monde peut être hypnotisable. En fait on a une plus grande facilité suivant nos convictions personnelles, suivant nos motivations. Si quelqu’un vient et sait que je fais ce type de pratique déjà c’est
renforcés sur le fait “ah oui donc là vous allez pouvoir m’aider c’est sûr”. Donc il est d’autant plus motivé ça va d’autant plus fonctionner mais en tout cas tout le monde a cette
capacité à être hypnotisable. Ce n’est pas perdre le contrôle encore une fois et c’est quelque chose qui peut se travailler. On revient à la neuroplasticité connexion neuronales et plus on le travaille et plus c’est facile et plus on le retrouve rapidement n’importe où n’importe quand.
Donc on explique ça, alors pas aussi long, mais je leur explique quand même ce que c’est l’hypnose. Ou du coup parfois je leur pose la question “qu’est-ce que vous connaissez l’hypnose” ou “c’est quoi pour vous l’hypnose” et hop ça permet de balayer quelques croyances ou de rebondir sur certaines choses. Une fois qu’on a fait ça, on va faire notre séance. Donc avant quand même, on détermine un objectif par rapport aux douleurs si c’est par rapport aux douleurs quel est l’objectif? Parce que ce n’est pas le même objectif pour tout le monde. Finalement il y en a qui ne veulent pas forcément se débarrasser de toutes leurs douleurs. Ils veulent juste pouvoir faire telle activité, pouvoir dormir correctement, pouvoir sortir avec des amis sans se poser de questions “mais au bout de temps de temps je vais avoir mal ça va être insupportable” enfin les choses des fois très précises.
Donc on définit toujours un objectif au début de séance et puis ensuite et ben on va utiliser différentes techniques. Les différentes techniques on les choisit suivant ce qu’on a entendu du bilan. Donc les techniques que j’utilise le plus souvent il y en a trois quatre que j’utilise beaucoup la première c’est la réification, la deuxième c’est le souvenir le souvenir, un souvenir agréable, un souvenir d’apprentissage, le troisième c’est le lieu sûr, lieu cocon, lieu ressource et le quatrième c’est la lévitation (mais c’est pas la lévitation on lève tout le corps).
Je vais commencer tout de suite par la lévitation. Je l’utilise beaucoup pour des douleurs d’épaules. C’est faire imaginer que tu tiens un ballon par exemple rempli d’hélium et c’est le ballon qui va soulever et qui va pouvoir aider une mobilisation passive ou une mobilisation active aidée donc voilà ça ça peut être la lévitation.
La réification c’est quand les patients ils vont me dire “ma douleur c’est rouges c’est dur c’est comme si ça avait une barre dans le dos” enfin tu vois il nomme il pose un objet sur la douleur. Parce qu’on entend régulièrement quand même “un coup de poignard”, “des fourmis”, “de l’électricité”… Et puis quand on leur fait dérouler ça, ils deviennent encore plus précis ils sont capables de dire c’est une barre qui est grosse c’est plutôt rond, c’est plutôt dur, ou alors s’il y a des picots… Enfin ils peuvent être très très précis.
Avec ce type de rééducation les patients sont actifs ils parlent en fait pendant la séance et on va leur proposer de modifier ce qu’ils ressentent. Donc dans les différents paramètres évoqués je vais leur demander cette sensation désagréable nommée, représenté par tel objet, si vous vouliez modifier quelque chose par quoi voudriez commencer? Ils vont me dire par exemple “je voudrais que ce soit moins dur”. D’accord et alors comment voudriez le transformer pour que ce soit moins dur? Alors là déjà ils ont des choses en tête, là on laisse défiler l’imaginaire sans limite des fois ils vont me dire je voudrais porter du chaud, je voudrais pouvoir le malaxer. Alors imaginez que vous êtes à l’intérieur de votre corps devant cette barre de fer qui est dure et imaginez que vous êtes en train de la malaxer que ça devient plus souple de plus en plus et là on les fait parler. J’interviens un petit peu et on fait dérouler jusqu’à ce que l’objet initial décrit devienne un autre objet ou peut-être même une disparition d’ailleurs. Ça va des fois jusqu’à disparaître pour que ce soit confortable à l’intérieur. Tu vois, donc ça c’est la réification, c’est un outil qui marche très bien quand les patients ont beaucoup d’imaginaire.
Il y a des passions que ça rassure de pouvoir parler aussi parce qu’ils sont actifs dans leur séance. Et l’actif c’est quelque chose que j’aime beaucoup évidemment dans la remise en mouvement, mais du coup c’est aussi une façon d’être actif dans son processus de comprendre sa douleur et de s’en détacher. La regarder autrement, en tout
cas et de se rendre compte que c’est souvent associé à des émotions. Parce qu’effectivement à la fin d’une séance on ramène toujours à comment vous sentez maintenant ce que vous sentez apaisé? Est-ce que c’est calme? Est-ce que c’est détendu? Est-ce que c’est plus paisible? Les faire verbaliser et des fois on est surpris de ce que les gens verbalisent d’ailleurs. On ne s’attend pas toujours à ce qu’ils disent pendant les séances, c’est ça qui est assez chouette d’ailleurs. Des fois on va très très loin avec l’imaginaire ils vont plus loin que nous franchement. Des fois j’étais hyper surprise par ce que les gens ont amené. Voilà très très chouette.
En rééducation pelvi périnéale, je traite aussi des patientes qui ont des douleurs pelviennes chroniques difficiles qui sont installés depuis très longtemps. C’est un d’autant plus difficile que ce sont des organes qui sont internes, qui ont des muscles qu’on a du mal à localiser, des douleurs qui sont encore méconnues même par des professionnels de santé, même par des médecins. Et donc du coup pouvoir aller aussi travailler sur ces types de douleurs avec cet outil c’est vraiment un gain incroyable. Donc là, la réification que j’utilise vraiment que j’adore utiliser et parce que ça développe plein de choses pour les patients. Parce que s’ils sont capables d’utiliser leur imaginaire là avec moi ils vont l’utiliser ailleurs ils vont utiliser d’autres champs de réflexion et de penser. Donc c’est aussi viser l’autonomie dans d’autres champs d’action. Ca déborde un peu de notre kiné classique, enfin vraiment, mais en tout cas c’est redonner de l’autonomie et plus on donne de l’autonomie aux gens que ce soit dans le mouvement ou ailleurs plus il sont convaincus qu’ils se porteront mieux en fait.
Les autres choses qu’on utilise aussi ça va être le souvenir le souvenir. Quelque chose quand on était petit ou même pas forcément, ou un souvenir d’un apprentissage, ou de quelque chose de particulièrement agréable. Et on veut se retrouver dans ces conditions là parce qu’on a particulièrement aimé ça. Donc on va utiliser voilà ce souvenir évoqué par le patient, si le patient l’amène directement. Par exemple je voudrais retrouver les sensations que j’avais eu quand je faisais telle chose ou quand j’ai appris telle chose. Par exemple “j’ai appris le violon c’était particulièrement difficile, mais par contre après j’ai pris plaisir à jouer. La notion d’effort c’est quelque chose que j’ai déjà connu, mais finalement je sais que ça peut m’apporter quelque chose de positif”… Donc là hop on prend et on rebondit dessus ensuite afin de pouvoir vraiment lier les deux. Même si on voit pas forcément le lien au début ça s’intègre vraiment, l’inconscient fait le lien, même si on s’en rend pas compte, à l’intérieur ça fonctionne.
Autre chose que j’utilise beaucoup c’est le lieu sûr le lieu cocon, lieu agréable, c’est un endroit réel ou imaginaire où on se sent particulièrement bien. On a tous une image qui nous vient, ça peut être en pleine nature, moi je pense à la montagne, ça peut être au bord d’une plage avec une mer magnifique, ça peut être dans un lieu qu’on n’a jamais vu, où on n’est jamais allé physiquement mais qu’on a vu derrière un écran ou dont on nous a parlé ou un lieu qu’on imagine. Mais en tout cas ce lieu sûr c’est un lieu dans lequel on peut se projeter où il y a pas de stress lié par l’entourage, il y a pas d’angoisse, il y a pas d’anxiété, un lieu dans lequel on va pouvoir se reposer se détendre. Et donc ça j’utilise beaucoup pour poser ce lieu sûr, et une fois que on a installé ce lieu sûr, on peut ajouter une technique de kiné par exemple. Donc on peut imbriquer l’hypnose et la kiné même dans les autres modalités, mais dans le lieu sûr je trouve ça encore plus adapté. On va installer ce lieu sûr et ensuite par exemple je vais rajouter une mobilisation passive. Une fois que la personne est plus calme détendue dans ce lieu sûr et ben c’est plus facile d’amener une mobilisation du genou qui avant était encadrés par de la peur, du stress et de l’anxiété. Parce que la dernière fois ça fait mal sur la mobilisation, parce que ça fait des années qu’elle a mal ou qu’il la mal. Donc du coup réinstaller déjà cette mobilisation dans un lieu sûr, ça change tout le cadre et donc tout ça ce sont des choses que les patients peuvent retrouver
évidemment.
Et je vais ajouter quand même, il y a quatre phases, pour moi trois à quatre phases, dans le déroulement d’une séance. Au début on propose au patient de s’installer, là dans ma salle par exemple les patients sont souvent allongés dans un lieu calme, mais finalement ça peut être aussi assis, ça peut être debout, ça peut être dans un lieu où il y a du bruit, ça c’est pas une contre-indication c’est juste un entraînement.
Après il y a l’induction, c’est à dire qu’on va déplacer l’attention et on va faire l’induction soit ce qu’on appelle avec le PAVTOG soit avec la respiration. La respiration évidemment gros lien avec le yoga et toutes les techniques de respiration qui est pour moi central évidemment. Le PAVTOG c’est une initiale qui correspond aux différents sens qu’on va vouloir mettre en lumière: P pour la proprioception, A pour l’audition, V pour visuelle, T pour le toucher, O olfactif, G gustatif. Audition ça va être écouté ou prêter attention au sons que vous entendez dans votre dans la pièce. Le toucher ressentez la table sous vos
doigts. Ca va être des choses comme ça tu vois, pour déjà placer son attention à différents endroits. Quand on utilise la respiration, ça va être de décrire le parcours de la respiration par les voies nasales par la cage thoracique, les côtes basses le ventre laisser de l’amplitude dans sa respiration peut-être la calmer, peut-être allonger les expires. Et une fois qu’on a installé l’induction avec le PAVTOG ou avec la respiration, ou peut-être les deux d’ailleurs c’est pas incompatible, on va passer au corps de séance avec les différentes techniques qu’on a évoqué ensemble avant.
A la fin on propose un ancrage. L’ancrage ça peut être un geste simple reproductible pour que la personne puisse retrouver les sensations de la fin de séance. Donc une sensation de détente, de sensations agréable et plus de sensations désagréables. Plutôt que de nommer d’ailleurs douleur, plutôt dire sensation désagréable. C’est un truc, mais ça fait quand même aussi la différence. Donc de passer d’une sensation désagréable à une sensation agréable ou confortable. De faire noter ça, de le faire remarquer par le patient, je fais souvent ça moi: le pouce contre le bord de l’index, mais ça peut être croisé les doigts, ça peut être serré le point, n’importe quoi qui vient spontanément au patient. Pour qu’il puisse le retrouver en dehors de la séance, pour que quand il le fasse chez lui, dès qu’il fait ce geste il retrouve les sensations. Plus il va le faire, avec la séance qu’on a fait, reproduire le déroulé qu’on a fait ensemble, avec son ancrage, c’est un geste qui va renforcer en fait les sensations de ressenti. Donc c’est là que se crée tout ce qu’on nomme dans la neuroplasticité et qui va faire que le chemin se fera de plus en plus facilement pour retrouver des sensations confortables. Voilà comment se passe une séance en tout.
Tu parlais du yoga aussi les mouvements en pleine conscience justement la respiration tu arrive à l’intégrer dans ta pratique de kinésithérapeute et en dehors également?
Oui complètement parce que finalement quand tu réfléchis sur une séance de yoga en tout cas moi comme j’aime les faire. Tu commences par une induction, tu proposes aux gens de s’asseoir dans une position confortable, de poser leur attention sur la respiration, ce qu’on fait exactement en hypnose. Et après, prêter attention aux sensations corporelles, ressentis du corps en mouvement, ou en statique, mais plus souvent mouvement finalement dans les types de yoga que je propose qui est du Vinyasa notamment. Et donc du coup c’est prêter attention à ce qui se passe dans le corps à ce moment là, et donc c’est vraiment ce déplacement du focus attentionnel, parce que dans notre quotidien on est tous là haut, dans la tête, beaucoup en tout cas, beaucoup trop. Et donc du coup de proposer de temps en temps de redescendre ailleurs, et voir ce qui se passe c’est pareil.
Donc j’utilise, j’intègre des postures de yoga dans mes pratiques de kiné et mes patients repartent avec des exercices, enfin des postures de yoga d’ailleurs, dans leur exercice à faire à la maison. Mais dans mes cours de yoga c’est vraiment ça. Et à la fin on termine par une méditation où on va amener des suggestions comme on amène en hypnose. Vous pouvez peut-être ressentir ou imaginer, imaginez le corps qui s’allège à chaque inspire qui se détend à chaque expire… Tout ça ce sont des suggestions, c’est la même chose qu’on retrouve en hypnose ce sont les mêmes mécanismes finalement, intellectuellement, au niveau cérébral c’est les mêmes choses. Sauf que renforcer par le fait que c’est ça dure une heure, il y a aussi le phénomène que c’est en groupe qu’il a quand même quelque chose qui se passe le fait que tout le monde fasse la même chose. Enfin voilà, quelque chose qui se passe avec ça d’autant plus que j’amène en plus de la musique, il y a tout un cadre
qui est posé autour qui favorise. Mais finalement plus on travaille que ce soit en kiné ou en hypnose appliquée à la kiné ou en yoga, plus on le travaille plus on le retrouve en dehors de la séance ou du cours sur le tapis. C’est vraiment ça l’idée c’est de ne pas faire une demi-heure par semaine, ou une heure par semaine, c’est que ça diffuse partout.
Donc voilà, et je voulais rajouter quand même que du coup j’ai des patients qui viennent soit pour directement pour ça, ou j’ai des confrères qui ne font pas d’hypnose appliquée à la kiné qui suivent leur patients et de temps en temps, une fois par mois, je vois leurs patients pour l’hypnose appliquée à la kiné. Ils continuent leur processus avec leur kiné où ils font plein de choses très bien et le patient arrive à regrouper les deux de lui-même et ça c’est chouette aussi.
Cette collaboration, c’est vraiment génial c’est pas tout le temps que ça arrive. Comment ça se passe?
Ce sont des collègues kinés que je connaissais déjà qui savaient que j’étais formé en hypnose appliquée à la kiné. En fait il y a deux patients que j’ai en tête, donc celui que je vois en ce moment par exemple il vient pour des douleurs neuropathiques ça fait un moment qu’il est dans la rééducation avec mes deux collègues qui le voient à domicile notamment et peut-être maintenant au cabinet aussi. Le patient avait des douleurs qui l’empêchaient de dormir la nuit, qui restreint son périmètre de marche il y a un déficit de mobilité aussi, au niveau de la cheville et au niveau de son genou, enfin voilà il y a pas mal de choses. Notamment ces douleurs qui le minent, il y a un impact sur le sommeil donc du coup il y a un
impact sur la gestion de la douleur donc après on sait très bien l’importance du sommeil notamment. Donc voilà donc il y a un gros impact sur toute sa vie personnelle professionnelle et tout son entourage avec lui.
Du coup on a mis en place ce partenariat, ce patient, il est prêt à tout essayer parce qu’il en peut plus de toute façon. Donc il est venu vers moi en me disant bah de toute façon j’essaierai tout ce qu’il faut je ferai tout ce qu’il faut donc il était hyper motivé déjà donc gros point positif. Il a des très bien décrit sa douleur, ce qui le gênait, ce qu’il attendait. Donc on a défini des objectifs ensemble on a fait une première séance où on a travaillé avec une technique que j’ai on n’a pas évoqué tout à l’heure, qui s’appelle le gant magique. C’est d’imaginer comme s’il y avait une protection autour de son de son pied et d’imaginer qu’à chaque fois qu’il déroule son pied à la marche, il ai moins c’est sensations de fourmillements etc. Donc c’est une autre technique qu’on a pris le temps de dérouler ensemble.
Je lui ai fait imaginer ensuite marcher avec cette chaussette, du coup c’est une chaussette magique, qui lui permet de marcher de manière plus confortable et surtout de pouvoir la réutiliser quand il a les marchés à l’extérieur, quand il se retrouve en séance de kiné avec mes collègues etc. Pour le coup ça pas été si simple que ça à émettre en place donc ensuite on a dit c’est pas grave, c’est peut-être pas la plus adaptée on a changé on a travaillé avec de la réification. Du coup il essaye chez lui, il a très bien compris la nécessité de l’autohypnose et en tout cas de faire cet exercice régulièrement chez lui de déplacement de
focus attentionnel. Il l’utilise la nuit aussi donc la nuit ça lui permet de se réendormir plus facilement, d’avoir des plages de sommeil plus longues, et donc du coup on sait très bien que si il y a un meilleur sommeil, il y a une meilleure gestion de la douleur tout simplement. Je fais un gros raccourci mais quand même c’est ça.
Donc en fait on va travailler sur différents paramètres et donc bah je continue de le voir une fois par trois semaines, un mois. Alors des fois il m’envoie un mail pour me dire Anne, ça, ça ne va pas du tout, ou, là j’ai besoin qu’on voit un truc et du coup bah je leur donne deux trois pistes. Du coup moi j’échange avec ses kinés et je leur dis aujourd’hui on a vu ça ça et ça, je lui ai demandé de faire ça ça et ça. Du coup ils mettent aussi un petit un petit focus de l’autre côté alors comment ça s’est passé la séance, qu’est-ce que tu as fait ou est-ce que
tu en es etc etc. Donc du coup ça c’est vraiment chouette, c’est impatient qu’on va suivre je pense quand même pendant un petit temps ensemble comme ça en collaboration.
Et l’autre personne à laquelle je pense elle venait à la suite un problème de genoux, il y avait des fractures multiples rotule enfin il y avait beaucoup de choses. C’était suite à une chute en montagne, justement randonnée, et elle avait une grosse appréhension de retourner faire de la randonnée bien que la rééducation avançait plutôt bien il y avait des choses qu’elle avait peur de faire: sauter sur le trampoline, se mettre sur un pied en équilibre etc etc. Et donc elle est venue me voir pour ça. Je l’avais vu au début de l’été, on a fait une séance avec elle, on n’a pas fait 50, on a fait une séance ensemble, je redis ce n’est pas une baguette magique je le redis en grand. On a fait quand même qu’une séance avec elle, et elle s’est imaginée en train de marcher comme avant dans ses randonnées qu’elle aime tant et d’éprouver des sensations confortables. Ensuite je lui ai demander de les retrouver quand elle marchait et ensuite de se dire que finalement c’était peut-être possible d’y aller, et d’y aller en progression, d’où la notion de progression qu’on trouve beaucoup en kiné mais aussi de le remettre là à cet endroit là et elle l’a fait. Et je le sais puisqu’elle est venue me voir à la fin de l’été donc, elle n’avait pas de séance, mais elle est venue me voir elle m’a dit mais vous savez finalement je suis allé faire de la randonnée, j’ai dansé comme j’avais jamais dansé, je n’osais plus danser. Finalement j’avais confiance sur mon genou j’avais plus de douleur et finalement j’ai refait tout un tas d’activités que je n’osais plus faire par peur évitement. Ca génial moi c’est le truc que j’adore des cadeaux pour moi, tu fais pas beaucoup en termes de temps en terme, je vois pas sur 50 séances mais le du coup là on apporte de l’autonomie
Comment vois-tu l’avenir de la de la kinésithérapie
Déjà il y a de plus en plus de spécialités dans la kiné donc je pense que c’est intéressant d’avoir ces spécialités parce que ça montre qu’on est pertinent, qu’on est efficace, qu’on est spécifique, qu’on sait faire des diagnostics. Donc il faut garder cette spécificité continuer à travailler avec des spécialités je pense à des spécialités moi je fais du musculo squelettique pelvi périnéale. Par exemple je ne suis pas spécialisé en neuro et voilà, mais du coup chaque kiné je pense à sa spécialité, ce qu’il fait vibrer j’ai envie de dire c’est plutôt ça, et donc ça à exploiter ++ pour garder ses spécialisations dans notre métier de kiné.
D’un autre côté il y a aussi ce lien avec tout ce qui va avec la pensée, avec donc ce qu’on utilise en hypnose, en méditation, le pouvoir de visualisation etc… et de faire ce lien entre le corps et la pensée. Pour moi c’est le futur de la médecine si on déborde de la kiné, c’est
aussi c’est ce qu’on appelle maintenant la médecine intégrative, c’est qu’on ne peut pas séparer le corps de la pensée et on voit bien toutes les interactions qu’il y a entre les deux/ J’adorerais que dans notre métier de kiné, même avec nos spécialités, on puisse aborder ces deux versants quel que soit notre spécialité, je trouve que ce serait vraiment chouette. Je ne sais pas si ça va se dessiner comme ça, j’espère parce qu’on voit quand même de plus en plus de dans nos formations de kinés de formation autour de la communication de la de l’entretien motivationnel et ça prend une part de plus en plus importante et on en a besoin parce que ça manquait cruellement dans nos cursus. J’espère qu’on va plus en plus rapprocher tout ça et notre spécificité de technique, de clinicien, et cette communication cette reprogrammation, cette entraînement cérébral, qui va avec cette réentraînement du corps finalement.
Il pourrait y avoir des dérives aussi. Enfin on voit quand même beaucoup de choses dans dans ce qui est proposé dans l’alternative et je pense qu’il faut quand même garder son esprit critique en tout cas par rapport à ça. Mais en tout cas l’idée c’est plutôt de rassembler les médecines qu’on pouvait appeler dur et douce ou en tout cas les différentes médecines et là je pense que ça va être temps de pouvoir les rassembler. Enfin on voit très bien les études qui sortent sur des patients qui ont des pathologies longues type cancer etc qui sont qui suivent des programmes MBSR en méditation, ils ont une bien meilleure qualité de vie que s’il faisait juste leur chimio tout seul de leur côté. Donc en fait, l’idée c’est vraiment de rassembler, rassembler ces différentes pratiques un groupe de personnes qui réunit au
même endroit donc ça ça permet aussi d’éviter justement les dérives.